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Centre International de Développement et de Recherche
PROMOTION DE DEVELOPPEMENT LOCAL ET D’APPUI AU PROCESSUS DE DECENTRALISATION AU TOGO Note d'intention au F3E
CIDR
Mars 2007
Promotion de développement local et d’appui au processus de décentralisation au Togo Note d’intention présentée au F3E par le CIDR Mars 2007
I. Du contexte à l’idée de projet A. Présentation de l’ONG Les programmes menés par le CIDR, dans le cadre de son département « Dynamique de territoire et développement communal », ont pour objectif de contribuer aux politiques nationales de décentralisation dans trois domaines principaux : l’amélioration des conditions de vie des populations, l’instauration de mécanismes favorisant la participation des acteurs de la société civile à la définition des politiques publiques locales et la consolidation du rôle des communes comme moteur du développement local en articulation avec les politiques régionales et sectorielles. Le CIDR mène des projets d’appui au processus de décentralisation depuis une dizaine d’années. Il a créé un département sectoriel spécifique en 2002 qui pilote aujourd’hui plusieurs programmes au Bénin et à Madagascar. 2.1. Programme de développement local et d’appui au processus de décentralisation dans le département des Collines au Bénin Dans le cadre du processus de décentralisation en cours au Bénin, le but de ce projet co-promu avec le Conseil Régional de Picardie est d’accompagner les populations (environ 500.000 personnes) et les collectivités territoriales des six communes du département des Collines dans une démarche de développement local et de décentralisation. A la fin de l’année 2006, les principaux résultats obtenus sont les suivants : -
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Elaboration dans chacune des six communes d’une charte de territoire contractualisant les engagements des élus et de leurs administrés, Dans le cadre de ces chartes, réalisation de plus de 600 infrastructures villageoises : écoles, centres de santé, ouvrages hydrauliques, gares routières, marchés, etc. sous maîtrise d'ouvrage communale, Appui au développement économique local : accompagnement de la création et promotion d’entreprises dans le domaine de la transformation et de la commercialisation de produits agricoles, diagnostic des capacités des services communaux, mise en place des cadres de concertation économique entre les acteurs publics et les opérateurs privés dans les six communes. Création d’un Groupement Intercommunal des Collines dont les charges de fonctionnement sont prises en charges à 57,5 % par les budgets communaux (avec pour objectif, une prise en charge totale, à partir de 2012), Signature d’un accord avec la Maison des Collectivités Locales pour la prise en charge par l’Etat béninois des animateurs de territoire et la promotion de ce nouveau métier au Bénin. Alimentation par l’Etat béninois du fonds de développement local (FDT) à près de 20% de l’enveloppe totale allouée aux territoires des Collines.
Dans le cadre de ce programme, le CIDR est responsable de la coordination générale et de l’appui technique au projet. A ce titre, il :
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Assure la liaison entre les différents partenaires du projet (Région Picardie, Département des Collines, bailleurs de fonds, acteurs locaux, autorités nationales), Détache un conseiller technique expatrié (à mi-temps depuis 2006), et organise les prestations d’appui conseil fournies par des experts externes, Réalise un suivi permanent et des missions de suivi-conseil annuelles.
2.2. Autres programmes au Bénin et à Madagascar Le CIDR mène actuellement 3 autres programmes de développement local et d’appui au processus de décentralisation : -
dans le département de l’Alibori au Bénin, en collaboration avec le Conseil Régional de Picardie et le PNUD. à Cotonou au Bénin, où il accompagne un programme de développement économique local (PDEL) sur trois arrondissements. à Madagascar, le programme est orienté sur le développement urbain dans les quatre villes secondaires de la Région Sava, au nord est. La seconde phase (2007-2011) met l’accent sur la mise en place d’une intercommunalité de service, l’articulation de la structure technique intercommunale avec le dispositif d’appui aux communes préconisé par le MDAT (CAC), l’adaptation des fonds d’investissement au futur FDL national, et la fiscalité locale.
2.3. Expérience du CIDR au Togo Le CIDR intervient depuis plusieurs années dans différentes régions du Togo au niveau de l’appui aux organisations agricoles et de la promotion d’entreprises de transformation et de commercialisation des produits agricoles. Dans ce cadre, en particulier dans la Région des Plateaux (première région d’intervention), il a noué des relations avec les autorités locales (départements de Haho et de Kloto en particulier), avec les services techniques déconcentrés (services agricoles, centres de recherche, etc.), avec les organisations paysannes locales et avec des entrepreneurs privés impliqués dans les activités de commercialisation et de transformation. B. Contexte et émergence de l’idée de projet Le Togo fait partie du groupe des pays les moins avancés (141ème rang IDH). En raison des déséquilibres macro économiques et structurels ainsi d’une longue crise socio politique, il est confronté depuis des années à un ralentissement de sa croissance, à un appauvrissement et à une baisse drastique de l’aide publique au développement. Aujourd’hui, la stabilisation amorcée mi 2005 se confirme et le Togo a pu mettre en œuvre les 22 engagements qu’il avait souscrit pour corriger le « déficit démocratique ». Les partenaires techniques et financiers envisagent donc de se réengager, sous réserve d’un déroulement satisfaisant des élections législatives de juin 2007. Le cadre juridique de la décentralisation est en cours d’examen en commission des lois et doit être voté par l’Assemblée nationale. Une cellule technique interministérielle est en charge de la mise en œuvre du « Programme de consolidation de la décentralisation » défini en 2004 (installation des collectivités locales, mise en place des conditions propices à leur gestion, et à terme réorganisation du découpage territorial et tenue d’élections locales). Globalement, hormis le PNUD et dans une moindre mesure l’UE, on constate un manque d’anticipation de la décentralisation de la part des bailleurs, qui se sentent peu concernés.
3 1. Présentation du travail d’identification effectuée Au mois de novembre 2006, le CIDR a réalisé une étude d’opportunité au Togo sur le thème de l’appui au processus de décentralisation. Cette étude s’est organisée en trois étapes : -
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Historique de la décentralisation au Togo et analyse des différents textes de lois actuellement à l’étude au niveau de l’Assemblée Nationale : Projet de loi portant organisation de l’administration territoriale au Togo ; projet de loi relatif à la décentralisation et à la démocratie locale ; projet de loi portant statut des agents des collectivités territoriales ; projet de loi portant coopération entre les collectivités territoriales, etc. Choix d’une zone d’intervention possible (Région des Plateaux1), étude monographique et rencontres des différentes catégories d’acteurs concernés par le processus de décentralisation : présidents des délégations spéciales des communes (Maires), présidents des délégations spéciales des préfectures, chefs de canton et représentants villageois, préfets. Rencontres au niveau central avec les autorités togolaises en charge de la décentralisation (Ministère de l’Aménagement du Territoire et de la Décentralisation, Direction Nationale de la Décentralisation, Direction du Plan, etc.) et les bailleurs de fonds impliqués dans l’appui à ce processus (PNUD, Union Européenne, Ambassade de France).
Les principales conclusions de cette étude d’opportunité sont les suivantes : -
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Les textes sont peu novateurs et l’approche est très « légaliste » ; Le schéma envisagé est complexe et pose un problème de coûts de mise en place sans que la réflexion sur la fiscalité dépasse le stade théorique ; Les maires, malgré leur statut ambigu (délégué spécial nommé par le gouvernement), manifestent une volonté forte de voir la décentralisation se mettre en place. (l’union des Maires a rédigé en 2005 un « Mémorandum des Communes du Togo au Gouvernement de la République togolaise »). Mais peu connaissent l’avancement des débats et du processus ; Les communes ont un personnel nombreux, âgé et peu motivé ; elles sont endettées, et n’ont aucune capacité d’investissement ; Dans les préfectures, les budgets sont figés et ne permettent pas de mener des actions en faveur des villages, qui n’ont pas de plan de développement.
Au final, l’ensemble des éléments d’opportunité ne plaide pas en faveur d’une intervention rapide visant seulement la mise en place d’un programme d’appui au processus de décentralisation [….] Il est souhaitable de proposer la mise en place d’une véritable démarche de développement local associant les populations et les autorités locales au niveau de la planification, de la hiérarchisation, de la réalisation et de l’évaluation d’actions de proximité. Une telle approche permettrait de tester des méthodes de planification participative, de réaliser des actions identifiées et voulues par les populations, d’introduire le principe d’une participation financière des « communes », de développer des programmes sur la fiscalité locale et de développer, par un dialogue régulier, un début de confiance entre les populations et leurs élus ». […] Le fait de précéder d’environ 12 mois la décentralisation effective permettrait de tester une démarche de « pays » ou « territoire » s’appuyant sur une planification inter-cantons préfigurant un niveau d’intercommunalité effectif.
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La plus vaste des cinq régions économiques du Togo. Avec une superficie de 16.800 km2, elle couvre près de 30 % du territoire national. La population est estimée à 1,2 millions d’habitants en 2006, avec une densité moyenne de 73 hab/km2 assez hétérogène d’est en ouest.
4 II. Le futur projet Ce type de programme nécessite d’apporter des réponses innovantes aux 5 enjeux principaux suivants. 1. Les enjeux de la décentralisation démocratique La décentralisation est envisagée comme un corollaire de la démocratisation. Comment promouvoir des formes de gestion de proximité participatives et responsables ? Comment favoriser le transfert des ressources, des fonctions et des pouvoirs de décision en direction des autorités de niveau inférieur largement indépendantes du gouvernement central et élues démocratiquement ? 2. Les enjeux de la gouvernance locale La gouvernance locale prend en compte la nécessité d’inclure, au-delà de la perspective étroite des autorités locales, les relations formelles et informelles diverses qui se tissent au niveau local, entre les différents acteurs du développement : collectivités territoriales, secteur privé, associations, agences déconcentrées. Comment s’assurer que cette démarche entraîne non seulement un accompagnement du transfert vertical des responsabilités et des ressources du gouvernement central vers les collectivités locales, mais aussi le développement de réseaux horizontaux entre collectivités locales et acteurs non étatiques locaux ? 3. Les enjeux de la participation citoyenne L’adhésion des populations au développement promu par les collectivités locales suppose une vision partagée d’un devenir commun sur le territoire communal. C’est tout l’enjeu de la nouvelle génération de projets dits « de territoire ». La culture de la citoyenneté doit reconnaître à chacun le droit d’attendre de la collectivité un certain nombre de services, et le devoir, pour lui, de participer à cet effort collectif de développement, notamment par le paiement de l’impôt. Comment (re)bâtir la confiance entre les populations et les institutions municipales ? 4. Enjeux de la réduction de la pauvreté et du développement économique local La décentralisation n’est pas recherchée comme une fin en soi, mais parce qu’elle offre de nouvelles possibilités dans la poursuite des objectifs de réduction de la pauvreté et de développement (économique) local, deux orientations majeures de la coopération au développement. La façon dont l’appui à la décentralisation peut contribuer à optimiser l’impact des interventions dans ces deux domaines, constitue une question stratégique. 5. Enjeux du renforcement des pouvoirs publics locaux Les politiques de décentralisation se mettent en place au moment où l’Etat ne parvient plus à satisfaire les attentes des populations. Cette situation est nuisible aux nouvelles collectivités locales qui sont mises en demeure de fournir des services aux populations sans en avoir réellement les moyens. Il est alors impératif de donner aux nouvelles collectivités locales les moyens d’assurer la maîtrise d’ouvrage effective des actions relevant de leurs compétences et de rechercher les appuis nécessaires dans ce sens (articulation avec les services déconcentrés de l’Etat et les politiques sectorielles). La mise en place d’un programme de promotion du développement local et d’appui au processus de décentralisation, nécessitera de travailler avec l’ensemble des interlocuteurs précités : maires, conseils municipaux, chefs de canton, préfets, etc. au niveau local, Ministère de l’Aménagement du Territoire et de la Décentralisation, Direction Nationale de la Décentralisation, etc. au niveau national. D’autre part, le processus de décentralisation au Togo est appuyé par des experts africains (en particulier malien et béninois) avec lesquels le CIDR a établi des relations de travail et de recherche depuis plusieurs années. Le programme proposé sera mené, au niveau national en collaboration avec la Direction Nationale de la Décentralisation et au niveau local avec les communes sélectionnées suite à l’étude.
5 III. L’étude préalable L’un des objectifs de la mission d’étude préalable est la sélection des communes puis la définition participative d’un programme pluriannuel avec les différents partenaires locaux, régionaux et nationaux. Il est difficile au stade actuel de définir avec précision une zone d’intervention. Les facteurs à prendre en compte sont à la fois objectifs (taille des préfectures et des cantons, populations, niveau de développement, etc. ) et plus subjectifs (dynamisme des populations, de structures organisées de la société civile, etc.). Les nivaux de développement sont variables entre les préfectures. La Direction Régionale du Plan classe les préfectures en quatre catégories : les préfectures traditionnellement dites « riches » qui se sont développées grâce à la culture du café et du cacao (Kloto, Danyi et Agou) ; les préfectures de niveau moyen (Wawa et Amou) ; les préfectures sans cultures de rente (Haho et Ogou) ; enfin les préfectures « pauvres » à forte densité de population et possédant très peu d’infrastructures (Est-Mono et MoyenMono). Afin de pouvoir mettre en oeuvre une phase test et obtenir des résultats « probants », il faut à la fois limiter la taille de la zone d’intervention à plus ou moins 300.000 personnes (mobilisation de moyens financiers permettant un impact visible pour les populations concernées), avoir une continuité géographique entre les préfectures retenues, pouvoir s’appuyer sur des dynamiques endogènes, etc. La réalisation de l’étude est programmée le deuxième semestre 2007. Un expert externe sera mobilisé par le CIDR pour piloter le travail de terrain. Cet expert interviendra en deux temps : une mission de lancement qui comprendra des entretiens avec les parties prenantes mais aussi le recrutement, la mise en place et la formation d’une équipe de trois enquêteurs locaux et une mission de synthèse. Un expert du CIDR France participera à la préparation de l’ensemble, à la mission de synthèse et à la validation du rapport d’étude de l’expert. La Direction Nationale de la Décentralisation sera associée à la mise en œuvre et à la synthèse de l’étude. Le budget est estimé à 40.000 €.