République Tunisienne Ministère du Développement, de l’Investissement et de la Coopération Internationale
Projet du Code de l’Investissement Version préliminaire
22 mai 2015
TITRE PREMIER. Dispositions Générales Article1premier. Le présent code a pour objectif de promouvoir l’investissement afin de concrétiser les priorités de l’économie nationale à travers: - l’encouragement à la création et développement des entreprises, la promotion de leur compétitivité et la montée de leur valeur ajoutée, - la réalisation d’un développement régional inclusif, équilibré et durable, - l’encouragement de l’exportation, - la création des postes d’emploi et l’amélioration de la compétence des ressources humaines. Article 2. Le présent code fixe le régime juridique de l’investissement réalisé par des personnes physiques ou morales, tunisiennes ou étrangères, résidentes ou non résidentes, dans tous les secteurs d’activités économiques. Article 3. Au sens du présent code, on entend par : -
Investissement : tout emploi durable de capitaux effectué par l’investisseur en vue de la réalisation d’un projet en Tunisie susceptible de contribuer au développement de l’économie tunisienne tout en supportant ses risques et ce, sous forme d’opérations d’investissement ou d’opérations de participation. 1. Opération d’investissement : toute création d’un nouveau projet autonome et destiné à produire des biens ou à fournir des services ou toute opération d’extension réalisée par une entreprise existante dans le cadre du même projet susceptible d’augmenter sa capacité de production ; 2. Opération de participation : la participation en numéraire ou en nature dans le capital de sociétés établies en Tunisie, et ce, lors de leur constitution ou de l’augmentation de leur capital social ou de l’acquisition d’une participation à leur capital.
- Investisseur : toute personne physique ou morale, tunisienne ou étrangère, résidente ou non résidente, qui réalise un investissement. - Entreprise : toute unité institutionnelle engagée dans la production de biens ou la fourniture de services, organisée sous forme de société ou d’entreprise individuelle conformément à la législation tunisienne. - Conseil : Conseil Supérieur de l’Investissement. - Instance : Instance Tunisienne de l’Investissement. - Fonds : Fonds Tunisien de l’Investissement.
TITRE II. L’Accès au Marché Article 4. L’investissement est libre en Tunisie sous réserve du respect de la législation relative à l’exercice des activités économiques. Les activités économiques sont classées selon la classification tunisienne des activités adoptée de manière unifiée par tous les services publics intervenant dans l’investissement. Article 5. L’investisseur est libre dans l’acquisition et la location du foncier et ce, pour la réalisation ou la poursuite des opérations d’investissement, sauf que l’accès à la propriété du foncier agricole est exclusif à l’investisseur tunisien en vue de réaliser des projets agricoles. L’investisseur peut réaliser des projets touristiques et de santé sur des terres agricoles sans besoin de changer leur vocation à condition qu’ils se basent essentiellement sur les spécificités naturelles, sauf que l’investisseur étranger ne peut réaliser ce type des projets que sous forme de location ou exploitation. Les conditions de réalisations des présents projets sont fixées par décret gouvernemental. Article 6. Toute entreprise peut recruter des cadres étrangers dans la limite de un tiers de l’effectif total des agents d’encadrement; au-delà de ce nombre, l’entreprise est soumise à une autorisation conformément aux dispositions du code de travail ; et dans tous les cas, l’entreprise peut recruter six cadres étrangers. Les procédures de recrutement des cadres étrangers sont soumises aux dispositions du code de travail à l’exception des paragraphes 2, 3, 4, et 5 de son article 258-2.
TITRE III. Garanties et Obligations de l’Investisseur Article 7. L’investisseur étranger reçoit un traitement non moins favorable que celui accordé à l’investisseur tunisien dans des conditions comparables eu égard aux droits et obligations prévus par le présent code. Article 8. La protection des biens/capitaux de l’investisseur et de ses droits de propriété intellectuelle est garantie conformément à la législation en vigueur. Sauf s’il s’agit de l’exécution d’une décision judicaire ou d’une sentence arbitrale, ne peuvent être expropriés ou nationalisés les biens/capitaux de l’investisseur sauf pour cause d'utilité publique et selon les procédures légales et sans discrimination sur la base de la nationalité et moyennant une indemnité juste et équitable. Article 9.
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L’investisseur est libre de transférer à l’étranger ses capitaux, en devises étrangères conformément à la législation des changes en vigueur. Dans les cas où le transfert à l’étranger nécessite l’obtention d’une autorisation, la décision de la banque centrale de Tunisie concernant toute demande de transfert établie et déposée conformément à la législation des changes en vigueur doit intervenir dans un délai de quinze jours à compter de la date de dépôt. Toute décision de refus de transfert doit être motivée et communiquée immédiatement au demandeur de transfert par écrit ou par tout autre moyen laissant trace écrite. Le silence de la banque centrale de Tunisie est considéré autorisation. Article 10. Ne s’appliquent pas à l’investisseur les amendements législatifs susceptibles de porter atteinte à son droit de bénéficier des incitations qui lui ont été octroyées pour une durée déterminé, à moins qu’il ne voit pas/n’opte pas pour le contraire. Article 11. L’investisseur doit respecter la législation en vigueur et fournir toutes les informations demandées dans le cadre de l’application des dispositions du présent code tout en garantissant la sincérité, l’exactitude et l’exhaustivité de toute information qu’il fournit.
TITRE IV. Gouvernance de l’Investissement Article 12. Il est créé un « Conseil Supérieur de l’Investissement» auprès de la Présidence du Gouvernement. Le Conseil est présidé par le Chef du Gouvernement et comprend des représentants du secteur public et du secteur privé. La composition du Conseil et son organisation sont fixées par décret gouvernemental. Article 13. Le conseil détermine la politique de l’Etat dans le domaine de l’investissement, il est chargé notamment de : -
L’approbation des stratégies et des plans d’action annuels de l’instance et du fonds, La supervision, le contrôle et l’évaluation des travaux de l’instance et du fonds, La prise des décisions nécessaires pour la promotion de l’investissement, L’évaluation de la politique de l’Etat dans le domaine de l’investissement à travers un rapport annuel publié.
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Article 14. Il est créé une instance publique autonome dotée de la personnalité morale et de l’autonomie administrative et financière dénommé « Instance Tunisienne de l’Investissement » ayant son siège à Tunis avec des représentations régionales. Le budget de l’instance est rattaché au budget du Ministère chargé de l’investissement. Les attributions de l’instance consiste notamment à : -
L’accueil, l’orientation, l’information et l’assistance de l’investisseur, La gestion des incitations financières et le suivi des projets, La supervision, le contrôle et l’évaluation des travaux du fonds, La coordination entre les différents intervenants dans le domaine de l’investissement, La proposition des réformes et le suivi de leur exécution, L’élaboration des rapports d’évaluation sur la politique d’investissement, La collecte et la publication des informations relatives à l’investissement, L’assurance du secrétariat permanent du conseil.
L’organisation administrative et financière de l’instance est fixée par loi. Article 15. IL est créé auprès de l’Instance un Interlocuteur Unique de l’Investisseur chargé notamment de: -
informer l’investisseur des incitations, des modalités de financement des investissements et des procédures de leur réalisation , effectuer, à son profit, les procédures de constitution juridique pour la création d’entreprises et toutes les procédures administratives que nécessitent les différentes étapes de l’investissement et lui délivrer les attestations y afférentes.
Article 16. La déclaration de l’opération d’investissement est effectuée par le dépôt de la liasse unique de l’investissement et les documents y annexés auprès de l’Interlocuteur Unique de l’Investisseur contre récépissé. L’Interlocuteur Unique de l’Investisseur délivre à l’investisseur un certificat de dépôt de déclaration d’investissement et les documents de création ou d’extension de l’entreprise dans un délai d’un jour ouvrable à compter de la date de dépôt de déclaration accompagné de tous les documents requis. Le contenu de la déclaration d’investissement est fixé par décret gouvernemental. L’investisseur doit informer l’instance par écrit de chaque modification des données contenues dans l’attestation de dépôt de déclaration d’investissement dans un délai de trente jours de la date de la survenance de la modification.
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Article 17. L’opération de constitution juridique des entreprises se fait par le dépôt de la liasse unique de constitution d’entreprises et les documents y annexés auprès de l’Interlocuteur Unique de l’Investisseur contre récépissé. L’Interlocuteur Unique de l’Investisseur accomplit les procédures de constitution dans un délai d’un jour ouvrable à compter de la date du dépôt de la liasse unique accompagnée de tous les documents requis et délivre au dépositaire ou à son mandataire une attestation de création de l’entreprise. Article 18. Le modèle de la liasse unique de création d’entreprises ainsi que celui de la liasse unique d’investissement et la liste des documents annexés et les modalités de délivrance des documents de création ou d’extension de l’entreprise pour chaque type d’entreprises sont fixés par arrêté conjoint des Ministres chargés de la justice, des finances, des affaires sociales et de l’investissement. Article 19. Il est créé une instance publique autonome dénommé le «Fonds Tunisien de l’Investissement » chargé de la gestion des ressources financières allouées à l’exécution de la politique et des stratégies de l’Etat pour la promotion de l’investissement. Les règles d’organisation et de gestion du fonds ainsi que ses ressources et conditions et mécanismes de son intervention sont fixés par loi. Article 20. Le Fonds intervient selon des programmes annuels élaborés suivant les priorités de développement dans le domaine de l’investissement à travers : -
La réalisation ou la contribution dans des opérations d’investissement, Le financement et la garantie des projets, L’octroi de primes au titre du développement régional et au profit des secteurs et activités prioritaires, L’octroi de prime de rendement économique pour renforcer la compétitivité des entreprises et l’encouragement de l’exportation.
Les taux, plafonds, conditions et modalités de bénéfice de ces interventions sont fixés par décret gouvernemental. Article 21. Les investissements à intérêt national dans les secteurs prioritaires peuvent bénéficier en vertu d’un décret gouvernemental après avis du Conseil de :
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La déduction des bénéfices de l'assiette de l'impôt sur les sociétés pour une période ne dépassant pas 5 ans, Les incitations citées dans le présent code, La contribution dans les dépenses extra- muros
Les investissements à intérêt national ainsi que la liste des activités prioritaires sont fixés par décret gouvernemental.
TITRE V. Règlement des Différends Article 22. Tout différend survenant entre l’Etat tunisien et l’investisseur à l’occasion de l’interprétation ou de l’application des dispositions du présent code sera réglé selon les procédures de conciliation à moins que l’une des parties n’y renonce par écrit. Les parties sont libres de convenir des procédures et des règles régissant la conciliation. A défaut, le règlement de la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International sur la conciliation s’applique. Lorsque les parties concluent un accord de transaction, ledit accord tient lieu de loi à l’égard des parties qui s’engagent à l’exécuter de bonne foi et dans les meilleurs délais. Article 23. En cas d’échec du règlement par la conciliation de différend survenant entre l’Etat tunisien et l’investisseur étranger à l’occasion de l’interprétation ou de l’application des dispositions du présent code, le différend est soumis à l’arbitrage. Le recours à l'arbitrage fera l’objet d’une convention spécifique entre l’Etat tunisien et l’investisseur étranger en vertu de laquelle les parties soumettront leur différend à l'un des organes suivants: - le Centre International pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements, - une autre institution d’arbitrage citée dans la convention d’arbitrage, - un tribunal arbitral ad hoc dont les procédures d’arbitrage sont régies par le règlement d’arbitrage de la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International à moins que les parties s’accordent à désigner un autre règlement ou une autre loi. A défaut de conclusion d’une convention d’arbitrage, les juridictions tunisiennes sont compétentes pour connaître du différend. Article 24. En cas d’échec de règlement par la conciliation du différend survenant entre l’Etat tunisien et l’investisseur tunisien à l’occasion de l’interprétation ou de l’application des dispositions du présent code, lorsque le différend présente un caractère objectivement international, les parties peuvent, en vertu d’une convention d’arbitrage, s’accorder de le soumettre à l’arbitrage. Dans ce cas, la procédure d’arbitrage sera régie par les dispositions du code de l’arbitrage.
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Dans les autres cas , le différend relève de la compétence des juridictions tunisiennes. Article 25. La saisine de l’une des instances arbitrales ou judiciaires est considérée comme étant une renonciation définitive à tout recours ultérieur devant tout autre organe arbitral ou judiciaire.
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