–UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE (PARIS 6) FACULTE DE MEDECINE PIERRE ET MARIE CURIE ANNEE 2012
N°2012PA90G074
THÈSE Pour le
DOCTORAT EN MEDECINE Diplôme d’état Par GUYON Pauline Née le 03 décembre 1985 Présentée et soutenue publiquement le 14 décembre 2012
PHENOMENE DE RAYNAUD : QU’EN PENSENT LES GENERALISTES ?
JURY de THÈSE : Président de Jury
Monsieur le Professeur Benoît MISSET
Directrice de Thèse
Madame le Docteur Isabelle LAZARETH
Assesseurs
Monsieur le Docteur Pascal PRIOLLET Monsieur le Professeur Jean TREDANIEL Monsieur le Professeur Philippe VAN ES 1
REMERCIEMENTS:
Aux membres du jury: A Monsieur le Professeur Benoît Misset Vous me faites l’honneur de présider cette soutenance de thèse. Veuillez recevoir mes plus vifs remerciements et l’expression de mon plus profond respect. A Madame le Docteur Isabelle Lazareth Vous m’avez fait l’honneur d’accepter la direction de ma thèse. Vous m’avez consacrée beaucoup de votre temps précieux et d’énergie. Vous avez toujours su être disponible. Vos qualités professionnelles et votre rigueur sont pour moi des exemples à suivre. Vous m’avez accordée votre confiance, j’espère en être digne. Veuillez recevoir toute ma gratitude et mes plus sincères remerciements pour ce travail effectué à vos côtés.
A Monsieur le Docteur Pascal Priollet Je ne pourrais trouver les mots suffisants pour vous remercier. Vous m’avez ouvert les portes du monde de la médecine vasculaire et de votre service. Votre enseignement, votre savoir et votre humanité auront été d’une importance déterminante dans mes choix professionnels, ma formation et mes projets. Vous m’avez toujours accompagnée en me faisant confiance. Veuillez recevoir à travers ce travail l’expression de ma plus profonde reconnaissance.
A Monsieur le Professeur Jean Tredaniel Vous m’honorez en évaluant ce travail. Veuillez recevoir mes remerciements respectueux.
A Monsieur le Professeur Philippe Van Es Avec gentillesse, vous avez accepté d’estimer ce travail. Veuillez accepter l’expression de ma respectueuse gratitude.
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A toute l’équipe du service de médecine vasculaire du Groupe Hospitaliser Paris Saint joseph, pour ce semestre inoubliable parmi vous. Au Docteur Ulrique Michon-Pasturel, pour m’avoir formée, guidée et accompagnée. Pour son soutien sans faille et tous ces bons moments partagés passés et futurs. Pour cette belle rencontre qui dépasse le cadre de la médecine. Au Docteur Stéphanie Bonhomme, qui m’a permis d’apprendre beaucoup à ses côtés autant sur le plan médical que personnel et qui m’a fait grandir. Pour avoir été là à un moment important de ma vie. Au Docteur Virginie Boursier pour m’avoir encouragée et pour son encadrement pendant ce semestre. Au Doteur Parinaz Ghaffari, pour son enseignement et son soutien. A Elia-belle, ma co-interne, mon amie. parce que ces 6 mois passés à tes côtés ont été riches d’enseignement, de partage, de travail mais aussi de rires et d’amitié sincère. A Axelle, qui m’a tant appris dans un domaine où je n’y connaissais que peu. A ce lien d’amitié tissé pendant ce semestre. A Dana, Valentine, Morgan, de belles rencontres faites en médecine vasculaire A Héléne, Anne-Claire, Anne-Laure, pour avoir égayé mes journées dans le service par votre bonne humeur. Et aussi : Au Docteur Brigitte Heller, Pour m’avoir transmis son savoir dans le domaine de la pédiatrie. Pour m’avoir accordée son amitié qui m’est très chère. A tous les médecins généralistes, qui ont répondu présent à mon enquête malgré de nombreuses sollicitations et sans qui ce travail n’aurait pu être possible, un grand merci 3
A ma famille A Nicolas, mon amour, je t’ai trouvé comme une évidence et tout est devenu possible. A tous ces jours futurs à vivre près de toi. A ma maman, grâce à qui tout a commencé et sans qui rien n’aurait été possible. Pour son amour si grand et ses rêves qui m’ont donné des ailes. Pour s’être toujours battue pour m’offrir cette vie merveilleuse…. A mon papa, pour m’avoir soutenu et aimé pendant ce long chemin des études. Pour ce côté perfectionniste, ces valeurs et cette rigueur qu’il m’a inculquée qui m’ont menée jusque là. A Luc, qui a toujours cru en moi à des moments déterminants de mes études et de mon avenir. Pour cette fierté qu’il partage de moi qui m’a donnée envie de réussir A Anne-Marie, pour son soutien et sa bienveillance A mon frère, Tancrède, pour avoir supporté mon humeur pendant toutes ces années d’études, pour être toujours là à mes côtés et pour être tel qu’il est. Je suis fière de toi. A mes petites sœurs, Jeanne et Louise, Pour tous ces moments passés près de vous qui ont contribué à mon équilibre, je vous aime A ma grand mère, mon étoile de vie, qui m’a donné cette force intérieure et cette détermination. J’aurais tant aimé que tu puisses voir ça. Tu me manques tous les jours. A mon grand-père, pour sa présence inconditionnelle à mes côtés depuis ma plus tendre enfance. A mes grands-parents de Paris j’espère que vous êtes fiers de moi de là ou vous êtes A ma marraine, mon petit cousin adoré et Nicolas, pour tous ces bons moments de famille passés près de vous qui participe à mon
équilibre.
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A Jeannine, ma grand-mère d’adoption. A Chantal, Maryleine, Marie-Odile, mes tantes de cœur. A Danièle et Philippe, mes deuxièmes parents. A Hervé, pour son soutien pendant mes années d’étude. Je remercie mes amis : A Perrine, mon amie, ma sœur, pour toutes ces années d’amitié passées et à venir. Tu es un des piliers de ma vie. A mes amies d’enfance, Camille, Eléonore, Alice, Alexia, Mélanie, Florence, Marion, Laura, Emilie et plus récemment Alexandra pour être toujours présentes près de moi après toutes ces années. Je crois qu’on est arrivé au rendez-vous fixé il y a 10 ans….vivement les 10 prochaines années. A Victoria, Anne-sophie, Manue, Juliette, Valérie et Alexandra, mes copines de médecine. Avec qui j’ai traversé (et même la Chine..) ces années de joie et de galère et qui ont soudé notre amitié profonde. J’espère qu’on ne se perdra pas de vue. A Lucile et Florent, ma coloc et mon cocoloc pour ces instants si forts partagés sous le même toit. Je vous souhaite beaucoup de bonheur. A Juliette, mon amie, pour tous ces beaux moments partagés. Pour sa présence à mes côtés. A Mathilde, Pour avoir été là à des moments clés, pour son amitié. A Sarah, pour cette amitié naissante depuis mon arrivée à Paris. A Claire, future confrère et amie. A ces rencontres que je ne peux toutes citer ici qui m’ont permis d’avancer et de devenir cette personne que je suis aujourd’hui…MERCI. 5
SERMENT ____ En présence des Maîtres de cette Ecole, de mes chers condisciples et devant l’effigie d’Hippocrate, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité dans l’Exercice de la Médecine. Je donnerai mes soins gratuits à l’indigent et n’exigerai jamais un salaire au-dessus de mon travail. Admis dans l’intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s’y passe, ma langue taira les secrets qui me seront confiés, et mon état ne servira pas à corrompre les mœurs ni à favoriser le crime. Respectueux et reconnaissant envers mes Maîtres, je rendrai à leurs enfants l’instruction que j’ai reçue de leurs pères. Que les hommes m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ! Que je sois couvert d’opprobre et méprisé de mes confrères si j’y manque.
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Abréviations : PR : phénomène de Raynaud SS : sclérodermies systémiques
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TABLE DES MATIERES REMERCIEMENTS: ..................................................................................................................................... 2 PREMIERE PARTIE .................................................................................................................................. 11 1. INTRODUCTION ................................................................................................................................... 11 1.1 UN PEU D’HISTOIRE : ........................................................................................................................................ 11 1.2 DEFINITION : ........................................................................................................................................................ 11 1.2.1 Savoir reconnaître le PR ..................................................................................................................................11 1.2.2 Savoir distinguer les autres acrosyndromes vasculaires..................................................................14 1.3 EPIDEMIOLOGIE ................................................................................................................................................. 15 1.4 DEUX TYPES DE PHENOMÈNES DE RAYNAUD....................................................................................... 17 2. BILAN ETIOLOGIQUE.......................................................................................................................... 18 2.1 INTERROGATOIRE: ............................................................................................................................................ 19 2.2 EXAMEN CLINIQUE ............................................................................................................................................ 20 2.2.1 L’examen des mains : .........................................................................................................................................20 2.2.2 L’examen vasculaire : ........................................................................................................................................20 2.2.3 L’examen neurologique ....................................................................................................................................21 3. EXAMENS COMPLEMENTAIRES ....................................................................................................... 22 3.1 ORIENTATION CLINIQUE PRECISE ............................................................................................................. 22 3.1.1 Devant un PR strictement unilatéral quels que soient l’âge et le sexe .......................................22 3.1.2 Prise de médicaments vasoconstricteurs retrouvée à l’interrogatoire ......................................23 3.1.3 Devant un PR bilatéral apparaissant chez une femme de plus de 35 ans ................................23 3.1.4 Devant un PR bilatéral chez un homme fumeur ...................................................................................23 3.1.5 Devant une profession exposée aux microtraumatismes retrouvée à l’interrogatoire ......24 3.2 ABSENCE D’ORIENTATION CLINIQUE ....................................................................................................... 24 3.2.2 Selon les recommandations françaises (issues d’un consensus d’experts) ...............................24 La capillaroscopie péri unguéale : .........................................................................................................................25 La recherche des facteurs antinucléaires ...........................................................................................................27 3.2.3 Selon la littérature internationale ..............................................................................................................27 NFS ........................................................................................................................................................................................27 TSH ........................................................................................................................................................................................28 Autres examens ...............................................................................................................................................................28 3.3 CONDUITE A TENIR PROPOSEE EN PRATIQUE ..................................................................................... 28 3.3.1 PR d’allure primaire sans signe clinique « suspect » ..........................................................................28
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4. TRAITEMENT ....................................................................................................................................... 29 4.1 MESURES GENERALES ..................................................................................................................................... 29 4.1.1 Des mesures simples de protection contre le froid ..............................................................................30 4.1.2 L’arrêt de l’intoxication tabagique .............................................................................................................30 4.1.3 Eviter une perte de poids brutale ................................................................................................................30 4.1.4 L’éviction des médicaments vasoconstricteurs .....................................................................................30 4.2 TRAITEMENTS MEDICAMENTEUX ........................................................................................................... 30 4.2.1 Inhibiteurs calciques ........................................................................................................................................30 4.2.2 Un alpha-bloquant : la prazozine ...............................................................................................................31 4.2.3 Les analogues de la prostacycline ..............................................................................................................32 5. ETUDE .................................................................................................................................................... 32 5.1 BUT DE L’ETUDE ................................................................................................................................................. 33 5.2 MATERIEL ET METHODES .............................................................................................................................. 33 5.2.1 Recueil des données............................................................................................................................................33 5.2.2 Analyse statistique..............................................................................................................................................34 6. RESULTATS ........................................................................................................................................... 34 6.1 TAUX DE REPONSE ............................................................................................................................................ 35 6.2 QUESTION DIAGNOSTIQUE ............................................................................................................................ 35 6.2.1 Diagnostic positif d’un PR si présence d’une phase blanche uniquement.................................36 6.2.2 Diagnostic positif d’un PR si présence d’une phase froide et érythrosique sans blanchiment :....................................................................................................................................................................36 6.2.3 Diagnostic positif d’un PR si présence d’une phase blanche puis bleue : ..................................36 6.3 QUESTION ETIOLOGIQUE ............................................................................................................................... 37 6.3.1 En pratique de ville, des examens complémentaires étaient-ils toujours demandés ? .......37 6.3.2 La réalisation d’une écho -doppler artérielle était-elle systématique ? ....................................38 6.3.3 Réalisaient-ils un bilan biologique devant un PR typique (bilatéral, isolé et chez une jeune femme) ....................................................................................................................................................................38 6.3.4 Quels examens biologiques demandaient-ils si ils avaient répondu favorablement à la précédente question ? ...................................................................................................................................................38 6.3.4 Réalisaient-ils une capillaroscopie de manière systématique ? ....................................................39 6.4 QUESTION THERAPEUTIQUE ........................................................................................................................ 39 6.4.1 Propositions thérapeutiques données par les médecins traitants aux patients consultants pour PR................................................................................................................................................................................39 6.4.2 Dispensaient-ils des conseils vis à vis du froid ? ....................................................................................40 6.4.3 Dispensaient-ils des conseils vis à vis de l’arrêt du tabac ?..............................................................40
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6.4.4 Dispensaient-ils des conseils vis à vis du caractère nocif des amaigrissements majeurs et rapides ?..............................................................................................................................................................................40 6.4.5 Proposaient-ils des inhibiteurs calciques dans les formes sévères de PR ?...............................40 DISCUSSION............................................................................................................................................... 40 7. DONNEES DE LA LITTERATURE ...................................................................................................... 40 7.1 A LA QUESTION DIAGNOSTIQUE............................................................................................................................. 41 7.2 CONCERNANT LE BILAN ETIOLOGIQUE ................................................................................................................. 42 7.3 CONCERNANT LA PRISE EN CHARGE THERAPEUTIQUE ...................................................................................... 47 CONCLUSION ............................................................................................................................................. 49 ANNEXE QUESTIONNAIRE DE THESE ................................................................................................. 50 TABLEAUX ET FIGURES ......................................................................................................................... 52 ANNEXES .................................................................................................................................................... 53 MAQUETTE................................................................................................................................................ 55 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ..................................................................................................... 55 RESUME...................................................................................................................................................... 59
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PREMIERE PARTIE
1. INTRODUCTION
1.1 UN PEU D’HISTOIRE : Le phénomène de Raynaud (PR) a été décrit pour la première fois en 1862 par un français, Maurice Raynaud (1834-1881), dans sa thèse de médecine intitulée « de l’asphyxie locale et de la gangrène symétrique des extrémités ». Ultérieurement, en 1932, Allen et Brown ont distingué, à partir de critères cliniques, la gangrène digitale liée à une thrombose artérielle décrite par Raynaud de l’acrosyndrome vasculaire résultant d’un spasme des artères digitales au froid qui est réversible. Ils étaient d’ailleurs les premiers, à différencier une forme primitive et secondaire de phénomène de Raynaud, appelée maladie de Raynaud pour la première et syndrome de Raynaud pour la seconde. Ces critères cliniques ont été révisés par Leroy et Medsger en 1992 (tableau 1.)
1.2 DEFINITION :
1.2.1 Savoir reconnaître le PR C’est un acrosyndrome vasculaire paroxystique. Il est l’expression d’un arrêt brutal mais transitoire de la circulation artérielle. Il est de durée variable. Il est le plus souvent localisé au niveau des mains mais est également retrouvé au niveau des pieds, nez et oreilles.
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Dans les formes complètes, trois phases se succèdent : - la phase syncopale : à la faveur d’un refroidissement ou d’une émotion, les doigts se décolorent, deviennent blancs, exsangues, froids, engourdis, insensibles comme morts (spasme artériolaire et fermeture des sphincters pré-capillaires). Cette phase dure de quelques secondes jusqu’à une heure parfois.
Figure 1 : La phase syncopale - la phase asphyxique ou cyanique : les téguments prennent alors un aspect cyanique, bleu, tout en restant froids. Il apparaît des phénomènes dysesthésiques qui se présentent sous forme de paresthésies à type de fourmillements, de picotements et de douleurs pulsatiles des extrémités concernées (spasme veinulaire et des sphincters post-capillaires, avec stase veineuse) Cette phase peut durer également plusieurs minutes.
Figure 2 : la phase d’asphyxie 12
- la phase d’hyperhémie : plus inconstante, les téguments concernés prennent une couleur rouge, parfois vermillon, accompagnée d’une sensation de brûlure parfois douloureuse. Sa durée est souvent plus brève (recirculation dans les territoires ischémiques).
En fait les formes incomplètes sont les plus fréquentes [1, 2]. Dans une série de 265 cas issus de la population générale, la phase blanche était décrite par plus de 97% des sujets, alors que les phases bleues et rouges étaient mentionnées l’une comme l’autre dans moins de 20% des cas [3]. Ainsi, la phase syncopale était la seule indispensable au diagnostic. Les deux autres phases pouvaient être prédominantes ou au contraire discrètes, et n’étaient pas indispensables au diagnostic. Ce blanchiment était déclenché classiquement par le froid, l’humidité, l’émotion. Le phénomène de Raynaud n’est qu’un symptôme. Tantôt il désigne un trouble vasomoteur purement fonctionnel, tantôt il annonce une maladie générale ou traduit une anomalie vasculaire locorégionale. Cette dualité qui conduit à opposer les phénomènes de Raynaud primitifs (encore qualifiés d’idiopathiques ou de maladies de Raynaud) et les phénomènes de Raynaud secondaires, est presque aussi ancienne que la description de Maurice Raynaud du trouble qui devait porter son nom. C’est d’ailleurs pour insister sur cette dualité qu’Hutchinson proposa, au tout début du XXème siècle, le terme de « phénomène « de Raynaud [4-6].
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1.2.2 Savoir distinguer les autres acrosyndromes vasculaires Les 2 principaux diagnostics différentiels à évoquer sont : - L’ACRORIGHOSE : est la sensation permanente et symétrique de mains ou de pieds froids, sans conséquence médicale particulière. Les mains peuvent être pâles, mais de manière diffuse et sans trouble vasomoteur. Il s’agit d’une plainte fréquente puisque sa prévalence en France est de 26%. Elle témoigne d’un terrain vasomoteur favorable à l’éclosion des autres acrosyndromes vasculaires. Comme pour le PR, on note un gradient de prévalence lié au climat, une prédominance féminine (2 femmes pour 1 homme) et un lien avec l’insuffisance pondérale. - L’ACROCYANOSE : souvent confondue avec le PR notamment dans sa phase bleue ; pourtant l’acrocyanose est un acrosyndrome permanent, touchant souvent les quatre extrémités. Elle est l’association d’une acrorighose, avec une coloration bleutée, indolore et symétrique des extrémités. Cette coloration s’arrête brutalement aux poignets. Elle s’accentue lors de l’exposition au froid et peut s’accompagner alors de sensations d’engourdissements. Il y a parfois une hyperhidrose palmo-plantaire. Il s’agit d’un acrosyndrome primaire et bénin [7] qui toucherait 15% des femmes en France et qui est corrélé à la maigreur.
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1.3 EPIDEMIOLOGIE
Le PR est retrouvé dans tous les pays avec une prévalence dans la population générale qui varie de 3 à 25%. En France, on peut l’estimer à 15% chez les femmes et 10% chez l’homme. TABLEAU 1 : prévalence du phénomène de Raynaud dans la population générale. Auteurs
Année
Pays/Région
Prévalence (%)
femme
homme
15,6
NM
4,3
2,7
LEPPERT
1987
WEINRICH
1990
HARADA
1991
Japon
2,5
3, 3
INABA
1993
Japon
3,4
3,0
VALTER
1997
Estonie
8, 3
7,9
Tarentaise (France)
20,2
12,7
Grenoble (France)
15,7
7,8
Nyons (France)
10,5
10,7
Toulon (France)
16,5
7,2
Charleston
5,8
4,1
MARICQ
1997
Suède
Prévalence (%)
Charleston (Caroline du Sud)
(Caroline du Sud)
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Les variations géographiques de prévalence observées dans les différentes études sont importantes, même quand la méthodologie de ces études est strictement identique. Elles sont principalement expliquées par l’influence du climat, et peut-être accessoirement par des différences ethniques. Elles portent principalement sur le phénomène de Raynaud primaire. Ainsi la prévalence du phénomène de Raynaud primaire chez les femmes qui habitent dans la vallée alpine de la Tarentaise est deux fois plus élevée qu’à Nyons (Drôme), alors que la sévérité moyenne des crises et leur fréquence chez les sujets atteints reste comparables. L’exposition climatique au froid n’est donc pas seulement un facteur déclenchant des attaques, mais aussi un véritable facteur étiologique. D’autres éléments comme l’incidence accrue en milieu rural et l’existence d’une liaison statistique négative avec la corpulence plaident pour l’existence de facteurs pathogéniques liés à la thermorégulation. Après le climat, le sexe féminin est l’autre grand facteur en cause dans le PR qui atteint 3 femmes pour 2 hommes. Cette différence liée au sexe apparaît plus faible dans la population générale que dans les séries hospitalières, les hommes consultant moins souvent [1, 8].
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1.4 DEUX TYPES DE PHENOMÈNES DE RAYNAUD Il existe deux types de PR : - le phénomène de Raynaud primaire ou maladie de Raynaud est idiopathique. Sa physiopathologie est multifactorielle faisant intervenir une hypersensibilité des récepteurs alpha 2 vasoconstricteurs et des perturbations dans la sécrétion endothéliale de médiateurs vaso-actifs [9]. Il a un profil type: - apparition précoce (habituellement avant 30 ans) - bilatéralité des symptômes - dans 85% des cas, peu invalidant - antécédents familiaux retrouvés dans ¼ des cas - touchant le plus souvent des femmes jeunes, minces et migraineuses - jamais de troubles trophiques à type d’ulcérations ou nécroses digitales - examen clinique normal -Les PR secondaires accompagnent des maladies oblitérant la macro- ou la microcirculation des doigts. La proportion entre PR primaire et secondaire est variable selon le lieu de consultation. En consultation hospitalière, spécialisées de rhumatologie ou de médecine interne, le PR secondaire est le plus fréquent et accompagne essentiellement des connectivites [10]. Par recrutement au sein de la population générale ou en consultation de ville, le PR primitif représente 75% des PR[11].
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2. BILAN ETIOLOGIQUE Les difficultés en matière de PR sont d’ordre étiologique [4], car les étiologies des PR secondaires sont multiples et il n’est pas possible de les rechercher toutes pour chaque patient de façon exhaustive. L’enquête étiologique est orientée par une démarche clinique assez simple, basée sur l’interrogatoire et l’examen clinique. Tableau 2 : Etiologies des PR secondaires [4] Causes médicamenteuses et toxiques - bêtabloquants
- bromocriptine
- ergot de seigle et ses dérivés
- ciclosporine
- bléomycine
- interféron alpha
- arsenic Connectivites
- sclérodermies systémiques
- dermatomyosite
- connectivite mixte (syndrome de Sharp)
- polyarthrite rhumatoïde
- lupus érythémateux aigu disséminé
- syndrome de Goujerot-Sjögren
Vascularites (autres que les connectivites) -cryoglobulinémies
- vascularite due au virus de l’hépatite b
-maladie des agglutinines froides Artériopathies - artériosclérose et athérosclérose
- fibrodysplasie
- embolie distale - défilé costo-claviculaire Causes professionnelles et traumatiques - maladie des engins vibrants
- microtraumatismes localisés chroniques
- anévrisme cubital
- maladie des décroûteurs d’autoclave Causes endocrines
- myxoedème
- acromégalie
- Hashimoto Affections néoplasiques Tumeurs glomiques Autres
- canal carpien
- fibromyalgie
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2.1 INTERROGATOIRE: L’interrogatoire est un temps essentiel de la consultation [12], en effet il cherchera à définir si le patient présente réellement un PR et il permet d’orienter de manière importante vers un PR primaire ou secondaire. Il faut rechercher certains critères notamment [13] : - âge d’apparition - sexe du patient - caractéristiques du phénomène de Raynaud : caractère uni ou bilatéral, pouces touchés ou non, rémission estivale, présence d’ulcérations digitales ou nécroses. - évolution du phénomène de Raynaud - facteurs environnementaux et toxiques (tabac, cannabis, cocaïne). - facteurs sensibilisants (médicaments) ou pathologies associées (canal carpien et syndromes neurologiques) - antécédents familiaux - profession, loisirs - signes extra-digitaux : amaigrissement, sécheresse des muqueuses, troubles digestif, arthralgies ou myalgies. Arguments cliniques en faveur d’un PR sévère: - sévérité des crises - apparition tardive (après 40 ans) - atteinte de tous les doigts - présence de phases cyaniques paroxystiques initiales, remplaçant la phase de blanchiment - aggravation inexpliquée Un PR est toujours secondaire s’il existe des ulcérations digitales ou des nécroses digitales
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Mis en forme : Surlignage
2.2 EXAMEN CLINIQUE [4, 14, 15]
Prérequis : il doit être réalisé sous un bon éclairage des mains. Objectif : recherche des signes en faveur d’une sclérodermie
2.2.1 L’examen des mains : Il recherche des signes en faveur d’une ischémie digitale : une cyanose douloureuse et froide d’un ou plusieurs doigts, en prenant soin d’examiner si les pouces sont touchés ou non. Il recherche également la présence de cicatrices distales à types de micro infarctus pulpaires, la présence de stries hémorragiques sous unguéales Enfin il recherche des signes évocateurs de sclérodermie systémique : sclérose cutanée, aspect boudiné des doigts, télangiectasies, présence de calcinose sous- cutanée, mégacapillaires visibles à l’œil nu au lit de l’ongle, pterygium inversus unguis. 2.2.2 L’examen vasculaire : - Palpation des pouls périphériques et auscultation des trajets vasculaires. - Recherche d’un souffle cardiaque. - Prise de la tension artérielle aux deux bras à la recherche d’une asymétrie significative en faveur d’une sténose des gros troncs artériels du bras. - Examen au niveau du creux axillaire : pratiquer les manœuvres dynamiques de Wright (annexe a) d’Adson (annexe b) et du chandelier (annexe c) en position anatomique à la recherche d’une compression vasculaire lors d’un syndrome du défilé thoraco-brachial. Lors de ces tests, on cherche à provoquer les symptômes décrits par le patient et à constater objectivement la compression thoraco- brachiale artérielle, veineuse ou nerveuse.
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- Examen au niveau des mains : réalisation de la manœuvre d’Allen qui recherche la présence d’une artériopathie digitale, au niveau des artères cubitales ou radiales, ainsi qu’au niveau de l’arcade palmaire ou des artères digitales. On demande au sujet de fermer fortement le poing, l’examinateur comprimant les artères radiale ou cubitale au poignet. Après ouverture de la main, on observe la recoloration de la paume après avoir relâché une première fois l’une des artères, puis l’autre. Normalement le temps de recoloration est rapide et comparable entre la radiale et la cubitale. L’absence de recoloration après avoir relâché l’une des artères témoigne d’une atteinte distale de celle-ci (sténose, occlusion). 2.2.3 L’examen neurologique Point important, il recherche un syndrome du canal carpien ou un syndrome du cubital au coude par un testing moteur et sensitif dans les territoires correspondants.
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3. EXAMENS COMPLEMENTAIRES Au terme de l’examen clinique : 1/- soit il existe des arguments orientant vers une étiologie précise et les examens complémentaires demandés seront fonction de cette orientation clinique 2/- soit il n’y a pas d’orientation clinique ; le PR est bilatéral et l’examen clinique normal et dans ce cas, un bilan étiologique minimum est recommandé 3.1 ORIENTATION CLINIQUE PRECISE
3.1.1 Devant un PR strictement unilatéral quels que soient l’âge et le sexe L’enquête étiologique est centrée sur l’exploration artérielle, avec recherche d’une anomalie vasculaire siégeant au membre supérieur homolatéral au PR. Dans ce cas, l’examen clé est le doppler artériel parfois complété d’une artériographie [4, 16]. Echo-doppler artériel Il permet de préciser la lésion vasculaire. Deux étiologies sont dans ce cas dominantes : - les sténoses de l’artère sous-clavière - la maladie du marteau Les étiologies possibles de sténoses sous-clavières avec anévrismes post-sténotiques responsables d’embolies dans les artères collatérales digitales sont nombreuses : athérome, artérites inflammatoires (maladie de Horton ou de Takayasu), post-radiques, posttraumatiques (fracture de la clavicule), ou dans le cadre d’un défilé costo-claviculaire. La maladie du marteau est une maladie professionnelle où les microtraumatismes répétés sur l’éminence hypothénar provoquent la formation d’un anévrysme de l’artère cubitale responsable d’embolies dans les collatérales digitales. Dans ce cas, le PR s’associe souvent à des signes d’ischémie digitale permanente : doigts froids, cyanosés et très douloureux, ulcérations digitales, hémorragies sous-unguéales.
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3.1.2 Prise de médicaments vasoconstricteurs retrouvée à l’interrogatoire Des PR ont été décrits après prise de bêtabloqueurs par voie orale ou locale, de vasoconstricteurs ORL, de dérivés de l’ergot de seigle, de chimiothérapie (bléomycine), de cyclosporine, de bromocriptine, d’interféron. Dans l’étude Framingham, la prise de bêtabloqueurs était en cause dans 1/3 des PR secondaires [17]. Chez les patients traités par chimiothérapie pour un cancer du testicule, 37% avaient un PR, apparu après la chimiothérapie dont 7% ont disparu à distance [18]. Ces acrosyndromes induits ne régressent donc pas forcément à l’arrêt du traitement, et surviennent volontiers chez des patients qui avaient déjà une hypersensibilité au froid peu invalidante (« doigts froids ».) 3.1.3 Devant un PR bilatéral apparaissant chez une femme de plus de 35 ans Il faut éliminer une connectivite, au premier rang desquelles une sclérodermie systémique (SS) ou un syndrome apparenté (connectivite mixte). Les autres connectivites (lupus, polyarthrite rhumatoïde, syndrome de Gougerot-Sjögren) peuvent également s’accompagner d’un PR. Mais dans la SS, il est quasi constant et constitue le premier signe de la maladie dans 90% des cas. Le bilan à réaliser dans ce cas est donc celui d’une SS. 3.1.4 Devant un PR bilatéral chez un homme fumeur Il peut s’agir d’un PR primitif survenant chez un homme fumeur, mais la notion de tabagisme doit faire rechercher des arguments cliniques en faveur d’une artérite digitale : abolition des pouls radiaux et/ou cubitaux, manœuvre d’Allen positive permettant de dépister des occlusions distales des artères cubitales et radiales, peau des mains sèche et cyanique, parfois cicatrices de petits troubles trophiques pulpaires. Le principal diagnostic à évoquer chez un homme jeune est une thromboangéite oblitérante de Buerger ou artérite juvénile distale. Elle s’exprime aux mains par un PR et parfois des ulcérations digitales, et aux pieds par une claudication intermittente des plantes de pieds, des troubles trophiques siégeant aux orteils et parfois des thromboses veineuses superficielles. 23
3.1.5 Devant une profession exposée aux microtraumatismes retrouvée à l’interrogatoire Les professions exposées aux vibrations (scies, marteau-piqueurs), sont des maladies reconnues comme professionnelles [19].
3.2 ABSENCE D’ORIENTATION CLINIQUE
On ne peut conclure d’emblée à un PR idiopathique, même s’il a deux ans de recul (critères de Smith et Allen). Il existe en effet des sclérodermies qui débutent par un PR qui reste isolé plusieurs années. Il a été ainsi proposé de réaliser dans ce cas un bilan étiologique minimum. 3.2.2 Selon les recommandations françaises (issues d’un consensus d’experts) Le bilan issu du consensus français [20] a pour but de dépister des sclérodermies systémiques sans sclérose cutanée (sclérodermies systémiques limitées selon la nouvelle classification de LeRoyroy) Deux examens complémentaires sont nécessaires pour dépister des SS limitées. En effet, un PR isolé peut précéder de plusieurs années les autres signes cliniques de SS. Cette donnée a été validée par plusieurs études de suivi longitudinal de patientes ayant un PR associé à des facteurs anti-nucléaires ou une capillaroscopie anormale. En effet, après plusieurs années de suivi, dans plus de 50% des cas, l’évolution se faisait vers une sclérodermie systématique avérée [21].
24
La capillaroscopie péri unguéale : Elle permet d’apporter l’expertise clinique du médecin vasculaire et de proposer un dépistage fiable permettant de rechercher une micro angiopathie- spécifique extrêmement précoce et fortement prédictive de la survenue d’une sclérodermie. C’est le paysage sclérodermique [16, 22]
Fig. 3 : Vidéo capillaroscopie La capillaroscopie unguéale permet de visualiser directement, de façon non sanglante, la microcirculation cutanée au niveau du lit unguéal. Le territoire cutané de la base de l’ongle est un site d’observation privilégié. A ce niveau, les capillaires habituellement perpendiculaires à l’épithélium cutané sont horizontaux et deviennent ainsi visibles sur toute leur étendue. Le capillaroscope ne visualise pas la paroi du capillaire, mais les érythrocytes qui en moulent la lumière. Ce sont donc les capillaires fonctionnels au moment de l’examen qui sont visibles. Ils prennent l’aspect de boucles en épingles à cheveux de 6 à 15 μm de diamètre, plus ou moins rectilignes et parallèles entre elles, alignées en plusieurs rangées (2 à 3) et orientées vers l’extrémité du doigt.
25
Cet examen est réalisé à l’aide d’un microscope optique à grossissement variable (15 à 100 fois). Il se fait par simple trans-illumination de l’épithélium cutané fortement éclairé par une lumière froide et rendu transparent par l’adjonction d’une goutte d’huile sur le territoire examiné. Une mire quadrillée intégrée à l’optique du microscope permet de compter les capillaires. La vidéo capillaroscopie permet la projection de l’image sur un écran et la prise d’instantanés que l’on peut mettre en mémoire. Une capillaroscopie normale est un argument supplémentaire en faveur de la maladie de Raynaud. Elle correspond à des anses capillaires fines associées à une pâleur de la teinte de fond. La teinte de fond traduit la vitalité tissulaire. L’utilité principale de la capillaroscopie est le dépistage de la micro- angiopathie sclérodermique, dont le critère majeur est représenté par le méga capillaire, qui est un capillaire très dilaté. Il peut atteindre plus de 50 μm de diamètre, soit 5 fois le calibre normal ; cela va de pair avec une diminution hétérogène de la densité capillaire et une désorganisation de l’arrangement des boucles. Cet aspect est sensible et précoce, fournissant actuellement le meilleur élément du dépistage des phénomènes de Raynaud à risque d’évolution vers une sclérodermie systémique.
26
Les critères mineurs de micro- angiopathie sont : - la réduction du nombre des anses (inférieur à 8 au mm) - la dystrophie ramifiée réalisant des images en feuilles de fougère - la désorganisation du lit capillaire et la présence de plages désertes - les hémorragies péri-capillaires à proximité du sommet des anses.
Fig. 4 : Mégacapillaires
Fig. 5 :
hémorragies
L’examen capillaroscopique a des limites : un épithélium cutané épais et opaque, fréquent chez les travailleurs manuels, ou un épithélium très pigmenté chez des sujets à peau noire, limite la pénétration du faisceau lumineux, pouvant empêcher la visualisation des anses et rendre l’examen difficile, voire impossible. De même, des soins récents de manucure peuvent créer de fausses images pathologiques (hémorragies) [23, 24]. La recherche des facteurs antinucléaires Basée sur des techniques fiables « immunofluorescence sur cellules Hep-2 » avec titrage du taux de facteurs antinucléaires et recherche de spécificité. Dans la sclérodermie systémique, les anticorps évocateurs sont l’anti centromère, l’anti-RNP, l’anti Scl 70 et l’antinucléolaire.
3.2.3 Selon la littérature internationale Les autres examens complémentaires réalisés de manières fréquentes et retrouvées dans les données de la littérature en plus des 2 examens complémentaires cités ci-dessus sont : NFS
27
En effet il n’y a actuellement pas de données suffisantes dans la littérature pour recommander la recherche d’une hémopathie de façon systématique devant un PR isolé mais celle-ci est fréquemment réalisée en pratique car peu coûteuse et elle permet d’éliminer un syndrome myéloprolifératif [25]. TSH Egalement peu coûteuse de réalisation elle permet d’éliminer une hypothyroïdie ou une thyroïdite d’Hashimoto, qui peuvent accompagner le PR.
Autres examens Les autres examens tels que la recherche d’une cryoglobulinémie, une radiographie de thorax ne doivent pas être réalisés sans argument en faveur et ne font en aucun cas partie d’un bilan minimal systématique. De plus, des tests prédictifs ont été mis au point et publiés dans la littérature : étude des réactivités vasculaires digitales au froid [26], étude des gradients de perfusion distauxproximaux et de la vascularisation digitale par laser-doppler imageur [27]
3.3 CONDUITE A TENIR PROPOSEE EN PRATIQUE [28]
3.3.1 PR d’allure primaire sans signe clinique « suspect » Le bilan minimal comportera une capillaroscopie péri- unguéale associée à la recherche de facteurs antinucléaire (+/- NFS et TSH selon les recommandations internationale).
28
Ainsi, si le bilan complémentaire est négatif, il n’y a pas lieu de prévoir de consultation de contrôle systématique. On ne propose au patient de le revoir que si il présente une modification de l’acrosyndrome (aspect, aggravation). Si le bilan complémentaire est positif, le diagnostic de sclérodermie systémique limitée selon la définition de Leroy et Medsger est évoqué [29]. Un suivi annuel est recommandé.
4. TRAITEMENT A noter que le traitement des PR dépend de la gêne engendrée plus encore que la cause du trouble vasomoteur [30, 31]. 4.1 MESURES GENERALES
29
En effet, que le PR soit primaire ou secondaire des mesures générales simples doivent être dispensées notamment : 4.1.1 Des mesures simples de protection contre le froid Elles concernent les mains mais également le corps entier. Il faut en effet éviter les variations brutales de température. 4.1.2 L’arrêt de l’intoxication tabagique Le tabac induit une réduction significative du débit cutané digital, mesuré par laser doppler, chez des fumeurs par rapport aux non fumeurs suggérant ainsi que l’arrêt du tabac peut avoir un effet bénéfique. 4.1.3 Eviter la perte de poids brutale 4.1.4 L’éviction des médicaments vasoconstricteurs En effet, certains médicaments sont susceptibles d’aggraver l’acrosyndrome tels que les dérivés de l’ergot de seigle, les bêtabloquants (y compris en collyre), les vasoconstricteurs ( y compris la voie nasale).
4.2 TRAITEMENTS MEDICAMENTEUX [4, 32]
4.2.1 Inhibiteurs calciques [30, 31, 33, 34]
30
Leur efficacité a été démontrée par plusieurs études prospectives randomisées en double aveugle versus placebo. Actuellement, le choix se porte sur les inhibiteurs calciques de la classe des dihydropyridines, qui diffèrent des autres classes par leur plus haute vasosélectivité, c’est-à-dire qu’ils ont une action plus forte sur les vaisseaux que sur le cœur. Seule la nifédipine bénéficie d’une AMM en France dans cette indication, elle apporte une amélioration mais généralement pas de disparition complète de la symptomatologie. Une étude randomisée en double aveugle portant sur 130 patients traités par nifédipine 30mg deux fois par jour pendant un an, a montré une diminution de 66% des épisodes avec 15% d’interruptions pour effets secondaires [35]. En effet, les inhibiteurs calciques donnent lieu à des effets secondaires bénins mais fréquents tels que céphalées, flushes du visage, œdème des chevilles, hypotension orthostatique, ce qui influence l’observance du traitement. La nicardipine (dihydropyridine) est également prescrite, hors AMM ainsi que le diltiazem (benzothiazépine) en raison d’une meilleure tolérance pour ce dernier, même si il semble moins efficace que la nifédipine. Le médicament doit ainsi être prescrit à doses progressives sur trois semaines étant donné le risque d’hypotension, et cela permet une meilleure tolérance. De plus, il a été prouvé que les effets directs consécutifs à la dilatation des vaisseaux tels que les céphalées, dépendent non seulement de la concentration plasmatique mais aussi de la vitesse d’augmentation de cette concentration. Ainsi, l’utilisation d’une forme retard une fois par jour est propre à provoquer moins de plaintes Ces médicaments sont prescrits en période froide dans le PR primaire et en continu dans la SS
4.2.2 Un alpha-bloquant : la prazosine [35, 36] La prazosine (Minipress®), inhibiteur des récepteurs α1-adrénergiques connu comme antihypertenseur, a montré des résultats concluants dans le traitement symptomatique du phénomène de Raynaud. Cependant, cette molécule présente des effets indésirables dominés
31
par l’hypotension orthostatique. C’est pourquoi il est nécessaire de l’administrer à une posologie faible et toujours très progressivement croissante 4.2.3 Les analogues de la prostacycline [35, 37-39]
Ils ont une place dans le traitement des formes sévères du PR, compliquées d’ulcérations digitales. Disponibles aujourd’hui en France, exclusivement par voie veineuse, les prostaglandines (iloprost), sont actuellement utilisées dans le traitement des troubles trophiques sévères des thromboangéites oblitérantes ou des ischémies critiques d’origine athéromateuse non accessible à un geste de revascularisation. Dans la prise en charge des PR sévères, des perfusions d’Iloprost (6 heures par jour à des posologies de 0,5 à 2 ng/kg/minutes, 5 jours consécutifs) ont montré leur efficacité dans une étude prospective versus placebo menée chez 131 sujets. La réduction du nombre de crises était significativement plus importante dans le groupe iloprost (39% versus 22% dans le groupe placebo) tout comme le score de sévérité (34,8% versus 19,7%).
DEUXIEME PARTIE
5. ETUDE
32
5.1 BUT DE L’ETUDE
Le but de ce travail était de préciser l’état des lieux du savoir des médecins généralistes concernant le PR en matière de : -
connaissances diagnostiques : PR établi sur l’interrogatoire devant la notion de blanchiment paroxystique et distinction avec les autres acrosyndromes (acrocyanoses et acrorighose.)
-
connaissance du bilan étiologique à réaliser
-
connaissance sur la prise en charge thérapeutique
5.2 MATERIEL ET METHODES 5.2.1 Recueil des données Nous avons réalisé une enquête transversale auprès d’un échantillon sélectionné de médecins généralistes exerçant en Ile de France. Cet échantillon était partagé en 2 groupes : -
les médecins généralistes pratiquant dans le 14ème arrondissement de Paris
-
Les maîtres de stage de la faculté de médecine Pierre et Marie Curie (Paris 6) qui dispense la formation aux étudiants en plus de leur exercice de ville.
Un questionnaire a été envoyé à tous les médecins généralistes du 14ème et à tous les maîtres de stage exerçant dans la faculté de Paris VI pendant le mois de mai 2012. Celui-ci était accompagné d’une enveloppe affranchie pour la réponse. Quelques médecins, une dizaine, ont reçu le questionnaire directement par mail avec réponses interactives. Les réponses ont été collectées par retour de courrier et les réponses interactives sur une période d’un mois et demi.
Le questionnaire, présenté en annexe 1, comportait 15 questions réparties en 3 parties. 1/ La première partie s’intéressait à la question du diagnostic positif devant un PR A savoir si la définition du PR était parfaitement maîtrisée par les médecins généralistes et notamment si le diagnostic positif porté était justifié. 2/ la deuxième partie portait sur le bilan étiologique du PR. 33
Elle s’intéressait à la pratique exercée en ville, notamment quels étaient les examens complémentaires réalisés. 3/ la dernière partie concernait la thérapeutique du PR. Notamment si des conseils hygiéno-diététiques étaient dispensés au patient par leurs praticiens. Mais aussi si des solutions thérapeutiques étaient proposées. 5.2.2 Analyse statistique Les réponses ont été codées puis recueillies dans un tableur Excel pour l’analyse statistique.
6. RESULTATS
34
6.1 TAUX DE REPONSE
Au total, 138 questionnaires ont été envoyés et 72 réponses ont été obtenues mais 2 des questionnaires avaient été retournés non remplis, ils n’ont donc pas été pris en compte. Ainsi le taux de réponse globale est de 50,7%. Parmi les 65 maîtres de stage interrogés, 42 ont retourné le questionnaire soit un taux de réponse dans cette population de 64,6% Parmi les 73 médecins généralistes du 14ème arrondissement, 28 ont retournés le questionnaire soit un taux de réponse dans cette population estimée à 38,3% A noter que certains questionnaires n’étaient pas complétement remplis et que certaines réponses restaient vides, principalement à la question diagnostique.
6.2 QUESTION DIAGNOSTIQUE
But de la question posée : déterminer devant quelle phase du PR les médecins généralistes interrogés portent le diagnostic de PR. 35
6.2.1 Diagnostic positif d’un PR si présence d’une phase blanche uniquement. Sur les 70 réponses, 60 médecins retenaient le diagnostic de PR devant la présence d’une phase blanche seule soit un pourcentage de 85,7% d’entre eux. 6 médecins ne retenaient pas le diagnostic soit 8,6% et 4 n’avaient pas répondu à la question.
NR=non répondu 6.2.2 Diagnostic positif d’un PR si présence d’une phase froide et érythrosique sans blanchiment : 22 médecins retenaient le diagnostic de PR en l’absence de blanchiment des doigts soit 31,4%. 57,1% excluaient le diagnostic. 8 d’entre eux n’avaient pas répondu.
6.2.3
Diagnostic positif d’un PR si présence
d’une
phase blanche puis bleue :
36
La majorité d’entre eux, soit 47, retenaient le diagnostic de PR dans ce cas de figure soit 67,1% 28,5% d’entre eux ne diagnostiquaient pas le PR. 3 questionnaires sur les 70 étaient sans réponse à cet item.
6.3 QUESTION ETIOLOGIQUE
6.3.1 En pratique de ville, des examens complémentaires étaient-ils toujours demandés ?
37
Seul 29 des médecins interrogés demandaient toujours des examens complémentaires devant le diagnostic de PR soit 41,4%. Les autres, soit 58,6% n’en pratiquaient donc pas dans tous les cas. Aucune non réponse à cette question.
Mis en forme : Surlignage
6.3.2 La réalisation d’une écho-doppler artérielle était-elle systématique ? Dans la majorité des cas, 84,3% les médecins ne demandaient pas de doppler artériel systématiquement. Seul 11 médecins sur les 70 réponses demandaient cet examen devant tous PR, soit 15,7%. En effet 47,1% d’entre eux préféraient réaliser le doppler artériel dans certaines situations. 6.3.3 Réalisaient-ils un bilan biologique devant un PR typique (bilatéral, isolé et chez une jeune femme) 40 médecins demandaient systématiquement des examens biologiques devant un PR typique. Ce qui correspondait à 57,1%. Parmi ceux qui en demandaient, 2 réalisaient un bilan exhaustif. Les autres soit 42,8% n’en réalisaient pas.
6.3.4 Quels examens biologiques demandaient-ils si ils avaient répondu favorablement à la précédente question ?
38
La numération formule sanguine était l’examen le plus prescrit.
6.3.4 Réalisaient-ils une capillaroscopie de manière systématique ? Seuls 15,7% des médecins demandaient une capillaroscopie dans tous les cas. Pas de non réponse
6.4 QUESTION THERAPEUTIQUE
6.4.1 Propositions thérapeutiques données par les médecins traitants aux patients consultants pour PR
39
La grande majorité d’entre eux s’entretenait avec le patient sur la thérapeutique du PR, en effet 56 sur 70 avaient des conseils thérapeutiques à l’égard de leurs patients soit environ 80%. 4 médecins n’avaient pas répondu à cette question 6.4.2 Dispensaient-ils des conseils vis à vis du froid ? Nous avons eu pour cette question 100% de réponses positives. 6.4.3 Dispensaient-ils des conseils vis à vis de l’arrêt du tabac ? En grande partie oui, avec un taux de réponse à 90% par rapport aux conseils formulés visant l’arrêt du tabac. 1 médecin n’avait pas répondu. 6.4.4 Dispensaient-ils des conseils vis à vis du caractère nocif des amaigrissements majeurs et rapides ? Seuls 12 médecins ont répondu positivement, soit 17,1%. En effet la plupart ne donnaient aucun conseil concernant cette question avec un pourcentage avoisinant les 78,5%. 3 questionnaires sur les 70 étaient non remplis. 6.4.5 Proposaient-ils des inhibiteurs calciques dans les formes sévères du PR ? 82,8% d’entre eux avaient recours à l’utilisation des inhibiteurs calciques dans les formes sévères du PR
DISCUSSION
7. Données de la littérature 40
On retrouve dans la littérature des études sur la prévalence du phénomène de Raynaud mais aucune ne s’est réellement intéressée à la démarche des médecins généralistes qui sont pourtant bien souvent les premiers à être consultés. Seule une thèse, effectuée à Lille en 2006, réalisait une enquête descriptive auprès des médecins généralistes de la région Nord et s’intéressait à la prise en charge des acrosyndromes et plus particulièrement du phénomène de Raynaud dans leur pratique quotidienne [40] .
7.1 A la question diagnostique
On constate que la grande majorité des médecins généralistes interrogés savaient reconnaître et diagnostiquer le phénomène Raynaud puisque 85,7% d’entre eux retenaient le diagnostic en présence d’un blanchiment paroxystique des doigts. Il existait par contre une confusion avec l’acrocyanose essentielle puisqu’ils retenaient également le diagnostic pour 31.4% d’entre eux en l’absence de phase blanche s’il existait une phase froide et érythrosique seule. Pourtant l’acrocyanose essentielle est un acrosyndrome vasculaire permanent, s’aggravant à l’exposition au froid, mais toujours bénin ne nécessitant pas d’explorations complémentaires [3]. Selon les données de la littérature [2], le diagnostic de phénomène de Raynaud se fait par l’interrogatoire. Il se définit comme un accès d’ischémie des doigts et parfois des orteils déclenché par le froid, complètement réversible en quelques minutes, et qui se traduit essentiellement par des changements de couleurs typiquement tricolores : blanc puis bleu et enfin rouge qui constitue la forme complète. C’est le cas le plus évident pour poser le diagnostic.
Cependant les données de la littérature [3, 6] montrent que dans un grand nombre de cas, le phénomène de Raynaud se présente sous une forme incomplète avec pour seule phase présente la phase blanche qui est la seule à être indispensable au diagnostic.
41
En effet en pratique, les formes complètes sont rares ; ainsi dans une série de 265 cas issus de la population générale, la phase blanche est décrite par plus de 97% des sujets atteints, alors que les phases bleues et rouges sont mentionnées, l’une comme l’autre, dans moins de 20% des cas. Parmi les signes subjectifs, la sensation d’engourdissement des doigts ou, comme disent les patients, de doigts « morts » est rapportée dans 94% des cas, et l’association « doigts blancs et engourdis au froids » a une sensibilité diagnostique de 93%. Ce travail montrait l’intérêt de l’utilisation complémentaire de clichés photographiques de Raynaud en crise, qui facilitent l’interrogatoire et améliorent notablement la spécificité diagnostique car il est rare que la crise soit visible au moment de la consultation. Déjà Maricq en 1986, proposait l’utilisation soit de photographies, soit d’un nuancier pour diagnostiquer la phase blanche du phénomène de Raynaud. Un outil d’aide à la prise en charge du Raynaud en consultation de ville pourrait comporter des photographies de phase blanche typique de phénomène de Raynaud et des photographies du diagnostic différentiel habituel qu’est l’acrocyanose
7.2 Concernant le bilan étiologique
Seuls 41.4% des médecins demandaient systématiquement des examens complémentaires face à un PR.
42
Parmi les examens complémentaires demandés : Les indications de l’échographie doppler Elles semblaient peu connues. En effet : -
15,7 % des médecins généralistes demandaient systématiquement l’écho-doppler
-
et seulement 47 % ciblaient l’examen en ne le demandant que dans certaines situations.
L’échographie-doppler doit être réalisée en cas de suspicion d’atteinte des artères des membres supérieurs Les indications de l’échographie-doppler sont : -
devant un PR unilatéral pour rechercher soit une sténose de l’artère sous-clavière, soit un anévrysme de l’artère cubitale dans le cadre d’une maladie du marteau
-
S’il existe des arguments cliniques francs évoquant un syndrome du défilé costoclaviculaire.
-
S’il existe une abolition d’un pouls ou un souffle vasculaire sur les artères des membres supérieurs (diagnostic d’une artériopathie digitale)
Sinon, dans tous les autres cas, la réalisation d’un écho-doppler ne doit pas être demandée. Dans la thèse réalisée à Lille en 2006, l’écho-doppler était un des examens très utilisés puisque 48,2% des médecins généralistes interrogés le demandaient (40).
Les indications du bilan biologique et de l’examen capillaroscopique des doigts : Selon les dernières recommandations françaises issues d’un consensus d’experts en mai 2012 [20], un bilan étiologique minimal doit être systématiquement réalisé en présence d’un patient qui consulte pour un phénomène de Raynaud. Ce bilan comporte l’examen capillaroscopique des doigts et la recherche de facteurs antinucléaires. Son but est de rechercher une sclérodermie systémique débutante 43
La présence d’anticorps antinucléaires dans l’évaluation d’un PR est significativement associée avec le développement d’une sclérodermie systémique, cela d’autant plus que le taux d’anticorps est élevé et si ils ont une spécificité anticentromère, anti-topoisomérase I, anti-nucléolaire ou anti-RNP[41, 42]. L’examen capillaroscopique est déterminant s’il retrouve un paysage sclérodermique. En effet, dans une cohorte de 104 patients ayant un PR isolé suivis pendant une durée moyenne de 3 ans [43] trois critères capillaroscopiques, la présence de mégacapillaires, d’hémorragies et le nombre de capillaires étaient liés au développement d’une maladie systémique.
Plusieurs études dans la littérature ont montré que la présence de facteurs antinucléaires et/ou une capillaroscopie anormale étaient prédictifs de l’évolution vers une sclérodermie systémique avérée. C’était le cas dans l’étude de Priollet en 1987 [44] . Parmi 24 patients ayant un
PR suspect, la moitié évoluait vers une maladie de système dans les 5 ans.
Fitzgerald en 1988 [16] retrouvait des résultats identiques. Ingenoli [45] en 2010, à partir d’une cohorte de 288 patients ayant un PR isolé, proposait un algorithme fondé sur la capillaroscopie et la présence d’anticorps antinucléaires. Il distinguait 44
ainsi 3 groupes de sujets. Le premier concernait les malades ayant soit plus de 8,4 anses capillaires par mm, soit moins de 8,4 anses capillaires par mm mais une recherche négative d’anticorps anti-nucléaires. Ces patients étaient à faible risque de développer une sclérodermie dans les 5 ans. Le deuxième groupe comprenait les sujets ayant moins de 8,4 anses capillaires par mm, des anticorps antinucléaires positifs mais sans mégacapillaires, le risque d’évoluer vers une sclérodermie était compris entre 10 et 50%. Le troisième groupe associait une réduction du nombre des anses capillaires (<8,4 mm), des mégacapillaires et des anticorps antinucléaires, le risque d’évoluer vers une sclérodermie dans les 5 ans était supérieur à 50%. D’autres études réalisées montraient une similitude dans les résultats [46, 47]. La conduite à tenir proposée par le consensus d’experts sur le bilan à réaliser au terme d’un examen clinique rigoureux devant un patient consultant pour un PR est la suivante : -
s’il y a une orientation précise au terme de l’examen clinique en faveur d’un PR secondaire : les explorations seront réalisées en fonction de l’étiologie
-
si le PR semble primitif : la réalisation d’une capillaroscopie et la recherche des facteurs anti-nucléaires est faite lors de la première consultation de manière systématique. Si les résultats sont négatifs, pas de suivi du patient nécessaire sauf si une modification du PR intervient (aggravation ou modification de l’aspect). Si le bilan est anormal un suivi régulier est proposé
Dans notre étude : En présence d’un PR bilatéral, isolé, sans orientation clinique, les indications du bilan biologique n’étaient pas claires pour la majorité des médecins généralistes. En effet, 57,1% des médecins demandaient systématiquement un bilan biologique et dans ce bilan, l’examen le plus demandé était la NFS prescrite dans 54,3%. La CRP était demandée dans 42.8% des cas, la VS dans 40%, la TSH us dans 34.3%, l’électrophorèse des protides et 45
la cryoglobulinémie dans 32.8%, la créatininémie dans 28.6%, les facteurs rhumatoïdes dans 25.7%, le bilan hépatique dans 22.8%. La recherche de facteurs anti-nucléaires n’était faite que dans 35,7% des cas Dans la thèse réalisée à Lille, les résultats étaient similaires puisque les facteurs antinucléaires étaient demandés par 44,4% des médecins généralistes interrogés. Cette recherche est insuffisamment demandée à la lumière des données de la littérature.
Les indications de l’examen capillaroscopique des doigts L’examen capillaroscopique était très peu connu des médecins généralistes, puisque seuls 15 % d’entre eux le demandait. A contrario, dans l’étude réalisée à Lille en 2006 [40], la capillaroscopie était l’examen le plus utilisé et très fréquemment demandé par 50,6% des médecins.
46
Pourtant depuis de nombreuses années il a été montré que la capillaroscopie périunguéale a un double intérêt : -
apporter l’expertise clinique du médecin vasculaire car l’analyse clinique précise de l’acrosyndrome est souvent insuffisante initialement.
-
être un examen de dépistage fiable qui permet de rechercher une microangiopathie spécifique extrêmement précoce et fortement prédictive de la survenue de la sclérodermie, selon les données de la littérature.
Une information des généralistes sur l’utilité de cet examen non agressif pourrait être proposée ainsi que les coordonnées des centres disposant de cette exploration. Dans le groupe hospitalier Paris Saint-Joseph, en médecine vasculaire, une consultation dédiée aux acrosyndromes avec réalisation de l’examen capillaroscopique existe. La diffusion de l’information parait nécessaire
7.3 Concernant la prise en charge thérapeutique
L’étude a montré que les médecins généralistes connaissaient bien la prise en charge thérapeutique face à un PR. En effet, 80% dispensaient des conseils thérapeutiques à la fin de la consultation. La grande majorité des règles hygiéno-diététiques pouvant améliorer le PR était connue :
47
-
100% des médecins généralistes interrogés donnaient des conseils de protection contre le froid
-
90% formulaient des conseils visant à l’arrêt du tabac
-
seul le caractère nocif des amaigrissements majeurs et rapides ne semblaient pas être connu puisque seuls17% des médecins généralistes interrogés donnaient des conseils concernant la perte de poids.
Des résultats similaires avaient été retrouvés dans l’étude réalisée en 2006 à Lille concernant la préconisation de l’arrêt du tabac et des mesures physiques simples (40). Ces mesures non médicamenteuses sont importantes puisqu’elles sont le traitement du PR peu gênant, sans retentissement professionnel et n’apparaissant que durant la saison froide (3). Concernant la prescription d’inhibiteurs calciques, elle semble d’après les résultats de l’étude bien connue des médecins généralistes puisque 82,8% d’entre eux avaient recours à leur prescription lors des PR sévères. Ces résultats sont différents de l’étude de 2006 où les inhibiteurs calciques étaient moins fréquemment prescrits (40,7%). Cependant cette étude ne précisait pas la situation dans laquelle le traitement était envisagé, notamment PR sévère ou non. Dans cette étude, les vasodilatateurs artériels étaient les « plus fréquemment » utilisés par 44,4% des médecins. Les pratiques semblent avoir évolué (40).
Les médecins généralistes interrogés dans notre étude étaient donc en accord avec les recommandations de la littérature, qui placent les inhibiteurs calciques en tête des traitements à prescrire lors de PR sévères. (32,34,47) Une récente revue de la Cochrane, publiée en juillet 2012 a réaffirmé que les inhibiteurs des canaux calciques sont les médicaments de choix dans le PR. Elle a porté sur l’efficacité d’autres médicaments pouvant être pris par voie orale, tel que les vasodilatateurs. Aucune preuve d’un effet sur la fréquence, la gravité ou la durée des crises n’a pu être montrée. 48
CONCLUSION Sur le plan diagnostique, la majorité des médecins généralistes connaissait bien la définition du PR, avec cependant une certaine confusion avec les diagnostics différentiels possibles, en particulier l’acrocyanose et l’acrorighose. Sur le plan thérapeutique, les médecins généralistes étaient également en accord avec les données de la littérature, aussi bien sur les règles hygiéno-diététiques que sur les médicaments à proposer en cas de PR sévères.
49
Le bilan étiologique à effectuer a été la difficulté majeure des médecins généralistes dans cette enquête En effet la réalisation d’un bilan biologique était : -
soit faite de manière exhaustive
-
soit non faite ou mal ciblée
La capillaroscopie n’était citée que par 15% des médecins généralistes. Ainsi le bilan étiologique minimal proposé devant tout phénomène de Raynaud sans orientation étiologique était méconnu par la grande majorité des généralistes. Au terme de ce travail, deux propositions peuvent être faites : -
la réalisation d’une plaquette qui reprendrait en une page recto les critères diagnostiques, le bilan minimum à réaliser, les conseils thérapeutiques
-
Porter à la connaissance des médecins généralistes du 14ème arrondissement de Paris, l’existence d’une consultation dédiée aux acrosyndromes vasculaires en médecine vasculaire au groupe hospitalier Paris Saint-Joseph, où dans le même temps, l’expertise clinique, l’examen capillaroscopique des doigts et des propositions thérapeutiques sont réalisés
ANNEXE QUESTIONNAIRE DE THESE Questionnaire de thèse : Les étapes d’une consultation pour phénomène de Raynaud 1- Diagnostic positif d’un phénomène de Raynaud si : a/ il existe une phase blanche : □ oui □ non b/ il existe une phase froide et erythrosique sans blanchiment : □ oui □ non c/ il existe une phase blanche puis bleue □ oui □ non
50
2- Diagnostic étiologique du phénomène de Raynaud : a/ demandez-vous toujours des examens complémentaires : □ oui □ non b/ demandez-vous un écho-doppler artériel □ oui □ non □ selon les cas c/ si la réponse précédente est selon les cas, dans quel cas : REPONSE LIBRE
d/ devant un phénomène de Raynaud bilatéral et isolé demandez-vous des examens biologiques : □ oui □ non e/ si la réponse précédente est oui, cochez dans la liste ci-dessous ce que vous demandez systématiquement : □ NFS CRP □ Facteur rhumatoide Créatinine □ Electrophorèse des protéines TSH □ Anticorps anti-cardiolipides Anticorps anti-nucléaires □ Protéine C f/ demandez-vous toujours une capillaroscopie péri unguéale ? □ oui □ non □ 3- Thérapeutique et phénomène de Raynaud a/ avez-vous des propos thérapeutiques pour ces patients ? □ oui □ non b/ donnez-vous des conseils de protection vis-à-vis du froid ? □ oui □ non
VS Bilan hépatique Cryoglobulinémie Anti-thrombine III
c/ donnez-vous des conseils pour l’éviction des médicaments vasoconstricteurs □ oui □ non
d/ donnez-vous des conseils pour l’arrêt du tabac □ oui □ non e/ donnez-vous des conseils sur le caractère nocif des amaigrissements □ oui □ non f/ proposez-vous des inhibiteurs calciques dans les formes sévères ? □ oui □ non
51
TABLEAUX ET FIGURES Tableau 1 : critères d’Allen et Brown originaux (1932) et révisés, permettant de typer un phénomène de Raynaud comme primitif. Critères révisés par Leroy et Medsger en 1992. Critères d’Allen et Brown (1932)
-survenue paroxystique lors de l’exposition au froid ou lors d’émotions -atteinte bilatérale et symétrique en général, au niveau des mains -absence de troubles trophiques et nécroses -pouls radial et cubital présents
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-pas de maladie générale sous-jacente -recul évolutif de 2ans Critères révisés par Leroy et Medsger (1992)
-recul évolutif de 6 à 8 ans -antécédents familiaux : prédisposition familiale -début avant 40ans -topographie : les 3 doigts médians, sans atteinte des pouces -femme longiligne ou à l’occasion d’une perte de poids importante -manœuvre d’Allen normale : évaluation de la circulation au niveau de la main
ANNEXES Annexe a : Manœuvre de Wright : patient allongé, bras en abduction, main derrière la tête Annexe b : Manœuvre d’Adson : assis, mains sur les genoux, inspiration profonde et rotation forcée de la tête du côté opposé à celui que l’on examine. Annexe c : 53
Manœuvre du chandelier : bras en l’air, tête fléchie vers le bas. Abduction à 90° en position assise et en effectuant des mouvements d’ouverture et de fermeture des mains.
MAQUETTE AIDE AU DIAGNOSTIC DU PR 3 phases successives peuvent être décrites par le patient C’est le cas le plus évident pour diagnostiquer le PR avec successivement phase syncopale puis cyanique et enfin erythrosique MAIS il faut savoir que SEULE la phase de blanchiment paroxystique est indispensable pour définir le PR. Les 2 autres phases, si elles sont isolées sans notion de blanchiment paroxystique, ne définissent pas le PR mais un diagnostic différentiel, le plus souvent l’acrocyanose.
PHASE BLANCHE
ACROCYANOSE
54
BILAN ETIOLOGIQUE En présence d’un PR isolé, sans orientation étiologique, deux examens complémentaires sont indispensables : - Dosage des facteurs anti-nucléaires - Capillaroscopie des doigts Ils permettent de diagnostiquer une sclérodermie systémique limitée THERAPEUTIQUES Mesures non médicamenteuses : - conseils de protection contre le froid - éviction du tabac - contre indications des médicaments vaso-constricteurs - précaution face à un amaigrissement majeur Mesures médicamenteuses : - recours aux inhibiteurs calciques si PR invalidants ou sévère - autres thérapeutiques possibles dans les formes très sévères après avis d’un confrère spécialiste
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RESUME Phénomène de Raynaud : qu’en pensent les généralistes ?
Le phénomène de Raynaud (PR) est un acrosyndrome vasculaire fréquent : 10% des femmes et 5% des hommes sont touchés en France. Le diagnostic est retenu sur la notion de blanchiment paroxystique des extrémités lors de l’exposition au froid. Les difficultés sont plus d’ordre étiologique en sachant que la forme primitive est la plus fréquente en médecine de ville (70% des consultants), mais que le diagnostic à ne pas manquer est celui de sclérodermie systémique (SS) débutante. En 2012, un consensus d’experts français a proposé un bilan minimum à réaliser chez tout patient consultant pour un PR pour lequel il n’y a pas 59
d’orientation étiologique au terme de l’examen clinique. Ce bilan comporte la réalisation d’un examen capillaroscopique des doigts et la recherche de facteurs antinucléaires. Ces deux examens sont en effet les plus rentables pour dépister une SS débutante But de l’étude : interroger un échantillon de médecins généralistes (MG) sur les critères diagnostiques du PR, le bilan réalisé, les propositions thérapeutiques
Matériel et méthodes : questionnaire envoyé à tous les MG du 14ème arrondissement de Paris et à tous les MG maîtres de stage de la faculté Paris VI Résultats : Cent- trente huit questionnaires envoyés. 70 réponses exploitables soit un taux de réponse de 50.7% (64.6% chez les maîtres de stages, 38.3% chez les autres MG). 85.7% des MG ont retenu le diagnostic de PR sur la notion de blanchiment paroxystique des doigts, mais 31.4% des MG également en présence d’une phase froide et erythrosique sans blanchiment. 58.6% des MG ne demandaient pas toujours des explorations complémentaires. En présence d’un PR isolé, 42.8% ne demandaient pas d’examens biologiques. Parmi ceux demandant des examens biologiques (57.2%), la NFS était l’examen le plus prescrit (54.3%). Les facteurs antinucléaires n’étaient prescrits que dans 35% des cas. Seuls 15.7% des MG demandaient une capillaroscopie. En terme de traitement, les conseils vis-à-vis du froid et du tabac étaient dispensés dans respectivement 100% et 90% des cas, les inhibiteurs calciques proposés dans 82% des formes sévères de PR Conclusion : les critères diagnostiques de PR sont méconnus dans 31% des cas, le bilan étiologique n’est pas ajusté dans plus de 50% des cas, la capillaroscopie, examen-clef dans l’exploration des PR est méconnue par 85% des MG. La prise en charge thérapeutique symptomatique est bonne dans 80% des cas. Mots clés : Raynaud, maladie de – diagnostique – capillaroscopie – médecins généralistes
Mis en forme : Surlignage
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